« On a tendance à penser qu’étudier l’art sous le prisme de la couleur est une entrée communautaire, ce qui est faux. »

Employees pose for photographers with an oil painting of black African muslim, Ayuba Suleiman Diallo, a freed slave, painted in 1733 by William Hoare, during a photocall at the National Portrait Gallery in London, on July 7, 2010. The gallery Wenesday launched an appeal to raise 100,000 GBP to aquire the image. AFP PHOTO / BEN STANSALL (Photo by BEN STANSALL / AFP)
Que dit la peinture de la perception des Noirs dans les sociétés européennes du XIVe au XXe siècles ? Après avoir étudié près de 5 000 tableaux sur lesquels figurent des personnages noirs, Naïl Ver-Ndoye et Grégoire Fauconnier en ont tiré l’anthologie Noir : entre peinture et histoire.
Cet ouvrage dense met en lumière des figures restées dans l’ombre de l’histoire de l’art. Leurs trajectoires singulières, du diplomate au soldat en passant par le domestique, éclairent l’histoire des relations entre l’Europe et l’Afrique.
Entretien avec Naïl Ver-Ndoye, professeur d’histoire-géographie.
Au-delà des préjugés, vous expliquez que les peintres ont eu du mal à reproduire la couleur des Noirs…
Les peintres ont fait de nombreuses expérimentations pour obtenir une teinte comme la mienne, c’est-à-dire marron. Il fallait faire des mélanges, travailler les pigments et le reflet de la lumière sur la peau. Or la lumière ne se reflète pas de la même manière sur les peaux noires ou blanches. On remarque cette difficulté dans les tableaux de Véronèse [1528-1588] datant de la Renaissance.
Le Radeau de la Méduse, exposé au Louvre, est l’un des tableaux les plus connus du grand public. On y voit trois hommes noirs. Le peintre Géricault les a volontairement ajoutés. Pourquoi ?
C’est un tableau militant. Géricault [1791-1824] raconte le naufrage d’une frégate coloniale sur les côtes mauritaniennes, le 2 juillet 1816. Sur le radeau, il fait figurer trois hommes noirs, dont un appelle au secours avec un haillon blanc. Pour les peindre, il s’est servi du même modèle, Joseph, un homme noir très connu à Paris. Il peint trois hommes alors qu’un seul a survécu au naufrage, pour interpeller sur le sort des Noirs et dénoncer la traite négrière.


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Sources : babelio.com (« Noir » de Grégoire Fauconnier et Naïl Ver-Ndoye ; 27/09/2018) ; lemonde.fr
